Automne 2024

Audomaro Hidalgo/ Coll. Je est un autre

traduit de l'espagnol (Mexique) par Gaëtane Muller Vasseur

De l'énigme d'une photographie unique de Borges et Octavio Paz nait ce livre,  une figure féminine floue se dégage en arrière-plan... Récit de la quête d'une identité entre vieille Europe et encore plus vieilles terres d'Amérique latine, de la profondeur des "tubercules" au grand vent marin de la poésie et de l'extrême culture.

[...]

j’écris en Normandie, où il m’arrive parfois de passer plusieurs semaines sans prononcer un seul mot d’espagnol, et c’est très bien ainsi. L’homme est autre dans la mesure où il cesse d’être lui-même, dans la mesure où il oublie d’être ce qu’il croit déjà être ou ce qu’il croyait être. L’homme est transition, mouvement, devenir. L’homme est une transmutation constante, l’homme est flux. De même, notre nom est la plus irréelle des choses que nous possédons. Ce dont nous avons besoin est d’un désapprentissage continu des récits, des approches et des classifications dont nous avons hérité, que nous ne remettons pas en question et avec lesquels nous affrontons le monde. Je vis sur les bords de ma langue, j’écoute le fleuve des voix de ma tradition, je m’enfonce dans le courant, je remonte les eaux, je vais là où naît la source, non pas pour me contempler mais pour te retrouver, parler avec toi, parler avec moi. Je vais à la recherche du nid de syllabes vers l’aube du langage, là je commence, là est ma fin, mon début, le nom exact de mon être dans ce monde.

Audomaro Hidalgo